CHRONIQUE PARUE DANS LE TRIMESTRIEL REIMS OREILLE ÉTÉ 2007

DURAND D'AVRIL

Sparadrap

D’abord, derrière tout ça, il y a surtout deux gars, Manu Codjia à la guitare, aux compositions et arrangements et Durand d'Avril au chant et aussi aux compositions. C’est plus dans l’esprit groupe pop ou rock qu’autre chose. On n’imagine pas Durand d’Avril autrement qu’avec le band qui vrombit derrière, la scène surélevée, les musicos en basket et le chanteur attaché au micro.
C’est l’univers de Durand d’Avril qui veut ça : les grosses américaines, voiture ou pin-up, les mots amerloques qui sont très rock, les rimes en –ik et en –ak pour l’Afrique qui raque sur un rythme reggae, le lipstick qui colle aux lèvres de Marilyn et laisse des marques sur le T-shirt immaculé, les créatures qui transmutent, le clinquant en trompe-l’œil, l’esthétique en chirurgie et la face cachée bien cachée qui montre tout le délabrement. Un p’tit coup de casquette quand même sur le mauvais good vivre venu des States et un coup de chatterton outre-Manche pour Miss Templeton. Un truc rigolo en jeu de mots avec un bovin place Beauvau… en attendant un zozo à l’Elysée ? Des batraciens inutiles, des mûres et des pas vertes, deux cannes en carton, une pomme dans la poire… et tout ça qui tient à un fil de sparadrap ! On aimerait même plus de camions de pompiers, c’est ce qu’il lui faudrait pour qu’il hurle, qu’il beugle et se lâche encore plus. Et pour finir, un réjouissant long morceau comme on n’en fait plus dans les radios, une rhapsodie matinale qui recolle tous ces morceaux… sans sparadrap.
Pour citer des références et faciliter le rangement dans les armoires, on évoquera toujours Thiéfaine sur certains titres. Aussi Higelin sur d’autres et c’est nouveau. Et même l’Yves Simon d’autrefois pour les chansons plus murmurées que chantées... et c’est très bien. Les Bowie, Lou Reed et autres rockers à la cadence décadente sont passés par là. Faudra de l’imagination pour ranger ces beaux morceaux de Sparadrap. Faire gaffe aux doigts, car ça colle aux oreilles, ces machins-là !

Christian Lassalle